lundi 26 juillet 2010

Les points de vue, quelle affaire ! (2ème partie)


Le narrateur omniscient est celui qui connaît tout de tout dans votre histoire. Imaginez-le assis près d'un feu en train de raconter son récit, nous faisant ressentir l'histoire qui se déroule derrière les personnages en même temps qu'il nous révèle ce qui se passe dans leur tête et dans leur coeur.

Pour vous illustrer ce qu'est un narrateur omniscient, reprenons la situation de Murielle qui apprend par un policier venu cogner à sa porte que son mari François et sa fille aînée Joudie sont morts dans un accident de voiture. (voir billet du 21 juillet)


2) PDV à la troisième personne (narrateur omniscient) :


Ce matin-là, un soleil de plomb réchauffe la ville, le temps est radieux, les fleurs épanouies et les odeurs d'herbe coupées embaument l'air de la rue Traverse. Des cris joyeux d'enfants jouant sur le trottoir accompagnent le chant des chardonnerets qui bondissent d'un sapin à l'autre. La vie est tranquille sur cette rue alors qu'à l'autre bout de la ville, des ambulanciers tentent par tous les moyens d'extraire deux corps aux membres déboîtés d'une Volvo accidentée. Le calme de la rue Traverse est cependant rompu par la venue d'une voiture de police qui se gare devant la maison jaune aux volets orange brûlé. Une maison coquette cerclée par une haie de jeunes cèdres.
L'agent Luc Malouin ôte ses lunettes fumées et soupire. Il appréhende ce qu'il va faire. Il redoute surtout les cris et les pleurs... Il fixe la rue devant lui en glissant sa grosse main dans ses cheveux courts, puis il sort de la voiture.
Pendant qu'il marche à pas lent vers l'entrée de la maison, à l'intérieur, Murielle, trente ans, cheveux bruns, yeux verts, vérifie fébrilement la terre des plantes de la cuisine. Dix minutes plus tôt, elle vidait les poubelles et comptait les valises. Tout devait être prêt avant leur départ. Un voyage à la mer. La mer... Depuis le temps que j'en rêve. Y être en famille ! Puis elle fouille nerveusement ses poches. Voyons, où je l'ai mise ? Elle se retourne. Sa liste est là, sur le comptoir. Elle la prend et la scrute. Après un moment, elle sourit : tout est coché. Elle jette un oeil sur l'horloge : 13 h 25. Que font-ils ? Ils devraient être là depuis au moins dix minutes. François, son mari et sa fille Joudie sont partis acheter une trousse de premiers soins, ce qui manquait pour compléter leur bagage.
— Marcus ? dit-elle.
—...
— Marcus ? Où es-tu ?
Aucune réponse. Elle se rend au salon et soupire d'impatience en voyant son fils de 6 ans toujours assis par terre, entouré de ses montagnes de Légos, près de la chienne Alice endormie.
— Qu'est-ce que tu fais ?
Elle se penche vers lui.
— On part bientôt et tu joues encore. Pourquoi ? Tu n'as pas hâte de plonger tes pieds dans l'océan ?
Marcus ne répond pas et ne sourit pas non plus, il s'applique à la construction d'une tour entièrement rouge. Un frisson saisit Murielle.
— Serre tes choses, mon grand, dit-elle d'une voix secouée. Et réveille Alice pour qu'elle soit prête...
Ding Dong !
Alors qu'elle se relève pour aller répondre, l'agent Luc Malouin essuie ses mains moites sur son pantalon, de l'autre côté de la porte. Une porte jaune serin. Et plus loin, dans la ville, le corps ensanglanté d'un homme de quarante ans et celui désarticulé d'une fillette gisent sur des civières.
Murielle ouvre.
— Madame Dutamoine ? commence-t-il.
— Oui, c'est moi.
Il la regarde avec sollicitude et lui prend délicatement les mains.
— J'ai le regret de vous annoncer, murmure-t-il, que votre mari et votre fille ont eu un grave accident de voiture. Vous devriez me suivre.
Murielle demeure immobile, le regard vide. Elle tremble. L'agent Luc Malouin aimerait tout lui dire, mais une fois de plus, il est incapable de révéler la vérité. Incapable...
Murielle plonge alors ses yeux humides dans les siens.
— Ils sont morts ?
Il baisse la tête et souffle :
— Suivez-moi, s'il vous plaît.
Elle se précipite dans le salon.
— Marcus, dit-elle d'une voix sèche, il faut partir, amène Aline.

On utilise ce PDV quand on veut montrer la vie intérieure de plusieurs personnages, et quand on veut montrer une vue globale de l'action, comme la vision d'un oiseau survolant la ville et ayant une vue panoramique de ce qui se passe. Ce narrateur peut efficacement se promener d'un personnage à un autre, d'une place à une autre, comme il convient à l'action. Cette narration aide à faire des transitions tout en douceur entre différents événements qui se déroulent simultanément (pendant que Luc marchait, Murielle vérifiait...). Vous avez une plus grande latitude dans la présentation de l'action et des descriptions, dans une scène, parce que vous n'êtes pas confiné à la perception d'un personnage ou plus.

Pour apprendre ce type de narration, lisez la série Charles Le Téméraire d'Yves Beauchemin, notamment le premier tome de cette série (qui, selon moi, est le meilleur, soit dit en passant).
Je vous le rappelle. La scène écrite ci-haut est un premier jet, avec toutes ses faiblesses. Elle se veut simplement un exemple d'une histoire racontée par un narrateur omniscient. Merci de votre indulgence.

La suite dans les prochains billets.

Merci d'être là et de me lire.

Annie :o) xxx...

2 commentaires:

  1. Finalement, aussi bien opter pour celui-là, l'auteur n'a plus à se soucier après de ce qui se peut et de ce qui ne peut pas. Et le point de vue peut changer à chaque personnage, le lecteur s'y retrouve très bien.

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  2. C'est le type de narration qui me vient automatiquement lorsque j'écris. Comme ClaudeL le dit, c'est celui qui cause le moins de soucis!
    Bravo pour tes extrais, ils sont très bien. Bon travail, Annie!
    (Tu vois,je peux être une bonne élève quand je m'y mets ;) )

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